Le Speakeasy
25, Rue Jean Giraudoux – 75016 Paris
Tél : 01 83 76 04 82
L’expérience du Speakeasy rappelle ces soirées où l’on ne regrette pas de s’être tracassé(e) à propos de ce que l’on allait porter, d’avoir pris le métro dans le mauvais sens (même s’il y a peu de chance que cela vous arrive à vous aussi), d’avoir affronté le vent d’une soirée fraîche en avril, tout ça pour quelques heures de bon temps. Car ces quelques heures, elles valent le coup.
Mon compagnon de soirée et moi arrivons dans les environs de 21 heures dans le quartier de l’Etoile, toujours aussi beau de nuit. Nous nous enfonçons dans une rue adjacente à l’Avenue d’Iéna pour découvrir ce petit bijou. Un portier est là. L’accueil est impeccable, on nous attendait. Après avoir déposé nos vestes au vestiaire, nous découvrons la salle : elle est magnifique.
Le jeu de lumières colorées et leur impact sur les matières – daim sombre des fauteuils, daim rouge des tabourets du bar, miroir au plafond et lustre doré au centre – est recherché, et très réussi.
Notre hôte nous propose de faire le tour de l’établissement. Nous descendons l’escalier. Voilà la cave à vin, dont la simple vue me donne des frissons ; amateurs de bons vins, vous êtes arrivés à destination ! On y trouve de très beaux châteaux, comme un Château Talbot Saint Julien Grands Crus – de différents millésimes ; un Château de Sales Pomerol de 1999, et même un Château Calon Ségur de 2000. Le reste des bouteilles – rouges, blancs, rosés – impeccablement rangé derrière la vitrine, présage du meilleur.
La seconde porte du couloir s’ouvre sur le fumoir, une pièce maîtresse du Speakeasy : la salle est superbe, doucement éclairée ; le cuir des canapés et le bois du parquet s’accordent avec subtilité. L’endroit est chaleureux, confortable et accueillant, intime aussi. L’idéal pour se détendre.
Le petit tour fini, on nous installe à notre table, et nous prenons en main la carte des cocktails : Caïpirinha, Pina Colada, Mojito… Pourquoi pas ? Pas si vite, le Barman s’approche de notre table. Il aime le contact avec les clients, nous explique-t-il, donc il s’adapte au restaurant en s’invitant quelques minutes à notre table. Pardon, j’ai dit Barman ? Il est mixologiste : il va créer un cocktail en fonction de nos goûts. En quelques questions il cerne nos envies. Vodka pour mademoiselle ? oui, mais pas trop fort… Des fruits, quelque chose de sucré alors. Il propose du rhum à Jérémy, qui lui laisse carte blanche. Nous goûtons la petite tapenade présente sur la table, et le docteur ès cocktails revient déjà : le cocktail de Jérémy est composé de Bacardi Gold (rhum brun), d’une purée de fruits de la passion et de jus de maracuja.
Dans le mien, la saveur du litchi trône au milieu d’un jus de concombre et de crème de coco, jus de fruits de la passion et sirop de framboise. Ah oui, et de la vodka aussi ; mais c’est tellement doux ! Les boissons ne sont pas froides comme souvent dans les soirées, simplement fraîches pour laisser chaque saveur se diffuser et prendre sa place en bouche. C’est fruité, subtil, très bien dosé ; mixologiste d’accord, mais mentaliste aussi.
Les entrées arrivent rapidement, avec un service agréable et attentif : Noix de Saint Jacques poêlées, relevées au vinaigre de vanille et sa salade d’herbes pour moi, Foie gras de canard en pressé et mangue en aigre doux pour lui. Les crustacés sont juste saisis et poivrés, avec un cœur de salade verte craquant et assaisonnée. + 1 pour la sauce vinaigrée, fruitée et sirupeuse.
Le foie gras est légèrement acidulé, la sauce aigre douce va très bien avec et la cuillérée de mangue en morceaux, presque confite, est extra.
En plat principal, Jérémy opte pour les Linguini au Homard. J’ai le droit de goûter : la sauce est onctueuse, la chair du homard est tendre, moelleuse et fond en bouche… Je cite : « c’est une pure merveille. »
J’oubliais de parler du vin ! Un Bourgogne blanc Chablis la Chablisienne pour lui, un Bordeaux Château Dassault Saint-Emilion pour moi. Le blanc laisse éclater ses saveurs de fruits, peu sucré, sec, mais bien fruité et pétille longtemps sur le bout de la langue. Mon Saint-Emilion, dont je réprimerai l’éloge de 30 lignes qui me vient, est incroyable. Le nez rappelle les sous-bois ; la profondeur et la puissance dans l’arôme laissent une empreinte forte, tannique, après la première gorgée.
Par curiosité je prends le Speakeasy Tiger ; ça sonne bien. Le bœuf est découpé en tranches, et cuit parfaitement – selon ma préférence – accompagné de ses « pommes pont-neuf », craquantes et épaisses. Il est nappé d’une sauce sucrée et pimentée, qui réchauffe bien le palais. Des noix concassées, assaisonnées et mélangées à des herbes aromatiques et de petits oignons, montrent que rien n’est laissé au hasard. Je n’arrive pas à finir mon assiette. Et c’est triste.
Cela dit, je relativise en voyant arriver mon dessert. Panna cotta à la rose, sorbet litchi. Dessert de filles, me direz-vous. Eh bien oui. Et c’est très bon, laissez-le nous. La glace est délicieuse, j’en attrape une noisette du bout de ma cuillère, avec un peu des noisettes caramélisées sur lesquelles elle est posée. Le parfum est délicat et subtil. La panna cotta à la rose, servie comme pour ressembler à un grand verre de lait, est aussi dense que son goût.
Plus spectaculaire, la Crème brûlée minute à la vanille, glace vanille, arrive en feu ! Les amateurs de sucre roux flambé aimeront la touche craquante du caramel, la tiédeur de la texture et la fraîcheur de la vanille en parallèle.
Il est 23 heures et les lumières baissent ; le show commence ! Le chanteur s’empare du micro, le DJ lance les musiques et les clips défilent sur l’écran géant, derrière eux. L’effet est garanti. Un saxophoniste accompagne la musique. On se croirait à Chicago ou à New York. Les musiciens sont là six soirs par semaine, et souhaitent recréer une ambiance décontractée. Nous sommes tous invités à nous lever pour danser entre (ou sur) les tables, au son des tubes des années 80 à aujourd’hui, du hip hop, de l’Elvis Crespo (nous avons du nous retenir de rejoindre la piste centrale), etc. Bref, de quoi satisfaire tous les goûts.
Nous nous laissons porter par l’ambiance et savourons encore un peu la musique, lorsque le barman mixologiste nous propose un dernier verre. Nous décidons de le prendre au bar : crème de Kahlua au fond du verre, Cointreau coulé par-dessus avec une cuillère pour ne pas mélanger les densités des liquides, flambé. C’est très beau, ma photo sera fade mais le rendu est génial. Je ne suis pas fan de café, mais la liqueur sucrée est excellente. Nous la sirotons jusqu’à ce que le Cointreau prenne le relais, et le sucré laisse place à l’alcool. C’est vraiment bon. Et surprenant.
Il est l’heure de quitter les lieux, alors qu’il est clair que la soirée ne fait que commencer. L’ambiance, le personnel, le cadre, pas tape-à-l’œil mais indéniablement classe, et la gastronomie sont au même niveau, et font du Speakeasy un établissement complet. Nous nous voyons très bien revenir, pour goûter un des plats copieux que nous n’avons pas pu tester ce soir, et un cocktail… Ou deux !
Restaurant le Speakeasy
25, Rue Jean Giraudoux – 75016 Paris
Tél : 01 83 76 04 82
Ouvert de 17h30 à 2h du matin